Folklore

Mise à jour : 14/01/2019 09:10:23

Histoire de la LIMOTCHE   Enquêtes du Musée de la Vie Wallonne  

Les deux siècles de la Limotche  

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Venez à Fosses-la-Ville

Folklore fossois : les Chinels   

 

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Folklore Hautventois

Histoire de la LIMOTCHE

Depuis les temps les plus reculés, bien avant l'obligation de l'état civil, une légende est venue jusqu'à nous. Elle s’est transmise de bouche à oreille d'une génération à l'autre, à l'époque où le peuple ne savait ni lire ni écrire. Pour ces motifs, aucun document écrit sur les événements ayant présidé à la naissance de la limotche d'Haut-Vent ne nous est parvenu. La limotche du hameau de Haut-Vent fut la première de la région de l'entre Sambre-et-Meuse. D'autres villages et hameaux prirent exemple sur elle et eurent aussi leur limotche mais bien souvent différente dans sa présentation vestimentaire.

En ce temps-là, les habitants des quelques maisons dont se composait le hameau gagnaient leur vie en pratiquant surtout les métiers de l'artisanat et de l'agriculture. Leur vie s'écoulait harmonieusement en ces temps de calme, de lenteur et de saines distractions, rythmée aux joyeux sons du marteau du ferronnier, au claquement régulier du métier à tisser, aux chants des sabotiers et aux bruyants éclats de voix des blanchisseuses lavant leur toile nouvellement née au ruisseau de la Biesme. C'était l'époque de la fenaison et les fermiers du hameau travaillaient dans leurs champs. Tout était serein, joyeux, ensoleillé. Les heures s'écoulaient paisiblement. Tandis que les fermiers regagnaient leurs logis, le soleil disparaissait à l'horizon et les champs devenaient déserts. Seules les meules de foin odorantes restèrent telles des sentinelles, montant la garde pour la nuit. Le soir tombait sur le petit vallon des forges, les blanchisseuses, l'une après l'autre, avaient aussi regagné les habitations. La nuit était d'habitude très calme et silencieuse; les habitants dormaient profondément, fatigué par les rudes travaux des champs.

Le lendemain matin un spectacle étrange attendait les fermiers encore engourdis de sommeil. Ils avaient peine à en croire leurs yeux: dans les champs, tout était saccagé, les meules de foin étaient renversées, éventrées. Les fermiers n'y comprenaient rien car la nuit avait été calme: aucun vent violent, aucune tornade. Quelle était donc la raison de ce désastre? La mauvaise nouvelle se propagea d'une ferme à, l'autre. Reprenant courage, les cultivateurs se mirent au travail pour réparer les dégâts. Cependant, ils restèrent soucieux. Le soir, tout était de nouveau en ordre: les jolies meules se profilaient à l'horizon. Avant de rentrer le foin dans les fenils, on devait, encore le laisser sécher sur place plusieurs jours. Croyant reconnaître la main du Diable, les fermiers décidèrent de rester dans les champs, la nuit, pour surveiller les meules. Deux nuits s'écoulèrent..... rien ne se produisit.. Soudain, la troisième nuit, les deux hommes de garde au grand champ de Pinson Haie entendirent un bruit insolite qui s'amplifiait. Apeurés, les fermiers s'éloignèrent de la haie de clôture de la pâture près de laquelle ils s'abritaient de la fraîcheur nocturne. Grâce au clair de lune, ils virent une espèce de bête à cornes, toute blanche, qui s'élançait avec fureur, telle une vache enragée, pour encorner les meules de foin. Ce foin se répandait ainsi autour de la bête qui poussait de drôles de grognements et de bizarres cris de joie. Les premiers instants de frayeur et d'étonnement passés, les deux hommes s'élancèrent vers l'étrange animal, qui, tout joyeux de détruire les meules, ne s'aperçut pas de leur présence. Les fermiers maîtrisèrent la bête et appelèrent les hommes des champs avoisinants. Voyant la bête capturée, les voisins se jetèrent dessus et 'a rouèrent de coups. La bête assaillie s'écroula sur le sol, et oh! stupeur! deux jambes apparurent sous un drap de toile blanche, tendu par un bâton fourchu et orné d'un long nez et de deux oreilles.. Etonnés, les fermiers enlevèrent le drap et découvrirent recroquevillé à leurs pieds un de leur valet de ferme. Cet homme agissait par esprit de vengeance: il avait été chassé de toute les fermes du hameau car personne ne voulait un paresseux, un ivrogne tel que lui.

Fous de rage, les fermiers poussèrent le valet hors du champs avec brutalité et en lui promettant une bonne raclée sur la place du hameau. Tout à coup, un pèlerin se présenta devant eux et leur barra le chemin en ouvrant lentement les bras. A la lueur de l'aube naissante, cet homme retenait la foule en fureur qui poussait devant elle l'être étrange, moitié animal, moitié homme.

Le calme revenu, le pèlerin écouta avec attention les récriminations des uns et des autres, ainsi que les propos de l'être étrange. Ce dernier se traîna et supplia le pèlerin d'obtenir son pardon. Celui-ci fit un nouveau geste pour faire taire tout le monde et comme la première fois, le silence revint. Il s'adressa à la foule et dit: « Je suis Saint BULTOT, je vous demande de me laisser juger et condamner cet homme ». La foule ne bougeait plus, stupéfaite... Une aura lumineuse peu à peu se dégageait de lui. Saint BULTOT releva alors doucement l'homme qui était à ses pieds et lui dit: « Je vois que tes remords sont sincères, efforces-toi d'enlever la haine de ton cœur à tout jamais; la peur que tu as eue servira de frein à tes mauvais penchants. Mais pour pénitence, tu devras une fois par année, le lundi de la fête du hameau, et cela jusqu'à lia fin des temps, remettre ce costume et faire le tour du village et des champs, poursuivi par des hommes en habits de fermiers et recevant de temps à autre, par l'un d'eux, un bon coup de torche de joncs, pour revenir le Soir sur la place du village, y faire un dernier tour et y mourir jusqu'à l'année suivante. Là, tu y donneras symboliquement et difficilement naissance à un bébé Limotche car c'est le nom que je donne à ton costume; je te suivrai moi-même tout au long de ton parcours du lundi et t'assisterai. Je serai représenté par un homme en pantalon de toile et sarrau, un chapeau de soleil le coiffera et aura des sabots. Il tiendra un sabot sur lequel sera fixé un bâton surmonté d'une carte de jeux traditionnels. Cette carte sera le valet de pique. Les gens croisant mon représentant devront baiser le valet de pique en faisant une obole au sabot. Le soir, après votre promenade, vous irez vous désaltérer avec cet argent dans les cafés du hameau. »

Tout le monde écoutait la sentence de Saint Bultot dans le plus grand silence et acquiescèrent à l'unanimité. Le pèlerin baissa alors les bras et se penchant de nouveau sur le valet de ferme, lui remit le bâton recouvert de la toile. Après un geste d'apaisement, il contourna la foule et reprit son chemin dans l'aube naissante, un sourire de béatitude sur les lèvres. Les fermiers et le valet regagnèrent leur demeure afin d'y prendre encore quelque repos. L'année suivante, le lundi de la fête, eut lieu la commémoration de la première limotche.

Cette histoire me fut contée dans mon enfance par mes arrière-grands-parents, grands-parents et parents. Elle symbolise l'éternel duel entre le mal et le bien. Il faut aussi savoir que le jour de sortie de la limotche, les personnes prises dans ses cornes connaîtront le bonheur toute l'année.

 

Haut-Vent, le 18 juillet 1977 Jacqueline Lambert-Boigelot.

Enquêtes du Musée de la Vie Wallonne

TOME VI 30e ANNÉE N°69-70 JANVIER JUIN 1953

 

LES FÊTES

La « limodje » de la Basse-Sambre

Dans une région assez restreinte de la Basse-Sambre (Presles, Vitrival, Aisemont, Fosses, Le Roux) existe ou a existé un divertissement qui semble inconnu ailleurs (1).

Nous allons voir en quoi il consiste et nous nous efforcerons, ensuite, d'en donner la signification.

FOSSE-LA-VILLE (Na 109)

 

La limodje fait partie au folklore de deux hameaux dépendant de la ville de Fosses : haut-Vent et Névremont; et cela depuis une époque qu’on ne peut pas préciser nettement (2).

a) Haut-Vent

Voici, d'après un auteur local du siècle dentier, comment les choses se passaient alors « Le lundi de la fête de Fosses, une troupe de jeunes gens, tambour en tête, descend dans la ville d'une colline voisine où se trouve le hameau a. Haut- Vent. Au milieu d'eux marche un homme recouvert a. serpillière, ce qui lui donne l'aspect d'un spectre; Il est conduit en laisse par deux autres satellites, dont un porte une patte de poule, dans un sabot, et l'autre, un valet de pic (sic.) Cette espèce de spectre s'appelle la limotche; il s'éfforce de faire les contorsions les,ridicules qu'il se hâte de cesser dès qu'on lui montre le valet de pic. Pour couronner cette grotesque plaisanterie, on simule d'abattre la limoche, à grands coups de gourdin, au coin de chaque rue. » (3)

S'il faut en croire Félicien BORBOUSE (4). Lorsqu’elle fit son apparition à Fosses, vers 1810, peut-être même avant cette date, la limodje n’avait ni train d'arrière, ni queue ; un homme se coiffait tout simplement d'une tête grossière façonnée au moyen d’une tête de brosse, surmontée d'une «fourche cheuresse » (5) figurant les cornes. Cette limodje primitive, tenue en laisse, était ainsi promenée les jours de fête par les rues de la localité. Où F. BORBOUSE a-t-il puisé cette documentation ? Il n'en dit rien. J'aurais voulu lui demander des précisions à ce sujet, mais il est décédé et sa veuve n'a pu me fournir aucun renseignement. A noter que l'intéressé, né en 1881, n'avait que 29 ans lorsqu’il écrivit cet article et qu'il ne s’est jamais occupé de folklore. Son affirmation ne peut donc constituer une preuve indiscutable. Ce qui montre D’ailleurs combien ses renseignements sont sujets à caution, c'est qu’il dit que la ville de Fosses. « a abandonné depuis longtemps » cette coutume, alors qu'à son époque, il n'y avait jamais eu d'interruption dans l'exhibition du monstre qui nous occupe (6), De nos jours encore, le lundi de, la ducace du hameau de Haut-Vent (troisième dimanche de juillet) a lieu régulièrement la sortie de la limodje (7) Vers six heures du matin, les trois personnages ayant un rôle à remplir dans cette affaire, se réunissent dans un café. Là, celui qui représentera la limodje, se costume : en main, il tient une fourche en bois de telle manière que les deux longues dents se trouvent sur le devant de son front et simulent deux cornes; entre celles-ci est attaché un rarnon (balai) constituant le museau. Un drap de lit largement déployé recouvre le tout. Au moyen d'une corde, la limodje est tenue en laisse par le « dompteur », lequel tient en main une torche de paille en guise de gourdin. Le « vétérinaire », porteur d'une valise, les accompagne afin de donner au malheureux captif, les soins qui lui seront nécessaires en cours de route. Précédé d'un tambour et de trois ou quatre musiciens, le groupe se met en marche et s'arrête aux cabarets et aux maisons où il y a de la jeunesse. Là, on danse; la limodje est ensuite frappée avec la torche et tombe. Le « vétérinaire »s'approche d'elle, l'ausculte et lui prescrit un « médicament » de Composition baroque, parfois un mélange de genièvre, de bière, de café, de vin, etc., le tout mis dans une bouteille et c'est à même ce flacon que le pauvre enchaîné boira cette mixture fantaisiste. Avant de la lui donner, le «dompteur» la goûte pour s'assurer «que c'est bon». La limodje est censée avoir toujours soif lorsqu'elle se présente chez l'habitant, et on lui donne de quoi se désaltérer ici du café, là du lait, ailleurs de la bière ou de la « goutte », et la malheureuse doit toujours tout ingurgiter. Souvent aussi, pour la Soutenir, on lui donne un oeuf à gober. Pour résister une journée entière à pareil régime, il faut avoir une solide constitution et un estomac de fer. Derrière ce groupe, marchent saint Bultot et deux acolytes; ils se rendent de maison en maison. Saint Bultot tient en main une baguette d'environ quarante centimètres de longueur au bout de laquelle est attaché un valet de pique qu’il donne à baiser aux habitants. En remerciement, Ceux-ci déposent dans un sabot tenu par le deuxième personnage ce qu'ils jugent bon, souvent, avant la guerre 40-45, cinquante centimes ou un franc. D'autres mettent dans la hotte tenue par le troisième du groupe, un morceau de lard ou des oeufs. Comme on le voit, deux des accessoires signalés par Kairis en 1858, subsistent encore, mais leur emploi diffère sensiblement. Depuis 1920, le petit cortège suit l'itinéraire suivant Haut-Vent, café Mathot (en face de la gare de Fosses), Trois-Bras, route de Mettet, Bocame, Haut-Vent. Avant cela le groupe se rendait parfois dans le centre de la ville et la limodje était tuée aux Quatre-Bras. Sur la fin de l'après-midi, lorsque l'animal n’a plus rien à boire toutes les maisons ayant déjà été mises à contribution , il se couche et meurt ; son agonie dure parfois une heure et même davantage. Souvent, alors, un des spectateurs pris de pitié, paye une tournée (quatre verres). Aussitôt, le « vétérinaire » s'empresse de masser le moribond, tandis que le petit orchestre joue un air gai. Petit à petit, la bête renaît à la vie un pieds remue, puis le second et, bientôt, elle est redressée. Le verre qu'elle absorbe achève sa guérison. Mais celle-ci n'est pas de longue durée. Peu à peu la 1imodje s'affaisse de nouveau et entre en agonie jusqu'au moment où un généreux passant payera une nouvelle tournée. La même scène se renouvelle plusieurs fois au cours de l'après-midi. Vers dix-huit heures, tous reviennent sur la place du hameau. La limodje qui, alors, est le plus souvent ivre-morte, reçoit encore de son «dompteur » des coups de torche jusqu'au moment où elle « crève ». Une fois de plus, le « vétérinaire » vient l'ausculter et lui prescrit de nouvelle, « drogues » qui la feront renaître insensiblement. On profite de ce moment d'assoupissement du héros de la journée, pour détacher le ramon qui est placé entre ses cornes; l'intéressé se débat pour qu'on ne puisse le lui prendre, mais ses efforts sont vains. Alors a lieu la fameuse « danse du ramon ». La. limodje débarrassée du drap de lit et de la fourche, reprend son balai et tout en sautillant autour de la place, le déplace continuellement : tantôt le met sous un bras, tantôt sous l'autre, ou entre ses jambes, au-dessus de sa tête, etc.; le « dompteur », avec des pincettes, s'efforce de le saisir et de l'immobiliser pour permettre au « vétérinaire », qui tient un manche de brosse en main, de l'approcher du balai, et, à un quatrième acteur, pris dans la foule des curieux, d'enfoncer ce manche en le frappant avec une pelle à charbon. Après plusieurs tentatives infructueuses, ils parviennent, enfin, à emmancher le balai et la danse prend fin. De nouveaux coups de torche sont donnés à la limodje qui finit par « crever » définitivement. Mais celui qui tient la torche en main, tout en frappant son souffre-douleur s'efforce toujours d'atteindre un des spectateurs, surtout s'il s'agit d'une « autorité ». Le soir, vers 19 heures, a lieu un bal populaire sur la même place. Pendant ce temps, les membres des deux groupes : limodje et saint Bultot, participent à un souper préparé avec le produit de la quête de la journée. L'argent reçu a servi à payer les boissons absorbées en cours de route. Ainsi se termine cette journée fatigante pour ceux qui y prennent une part active. La limodje ne sortit pas pendant la guerre 1914-18. Elle fit sa réapparition en 1920. Quelques années plus tard, en 1923, on aurait cru que ce en était fini de cette curieuse coutume. Un journal local lui avait consacré un article nécrologique. Le fait était dû à ce que le nombre de cabarets de Haut-Vent était réduit à un, au lieu de neuf précédemment, ce qui ne permettait plus de couvrir les frais de la ducace. Mais l'interruption ne fut pas de longue durée, la tradition reprit ses droits en 1928. La dernière guerre mondiale a immobilisé notre monstre de 1940 à 1944 inclus; il est réapparu en 1945.Il ne s'est pas montré en 1949 parce que celui qui devait l'incarner était en deuil. On a recommencé l'aimée suivante.

(1) La Province de Namur du 15 septembre 1936 fait erreur en disant que la « limodje » se montre aussi à Bambois (hameau de Fosses).

(2) Jules BORGNET, Cartulaire de la commune de Fosses, Namur, 1867, n'a vraisemblablement trouvé aucune trace de cette coutume dans les documents anciens, attendu qu'il n'en fait aucune mention, alors qu'il signale des extraits se rapportant au rand feu (pages 288, 311, 314, 319), aux comédies interprétées à l'occasion du carnaval (p. 316, 317) et aux hommes sauvages prenant part à la procession Saint-Feuillen (p. 317-320).

(3) Charles KAIRIS, notice historique sur la ville de fosses. Liège, 1858, p.57 ; reproduit sans commentaire par Auguste LURQUIN, Glossaire de Fosse-lez-Namur, dans Bull. Soc. Litt. wall., t. 52, 1910, P. 138 (t. à p., Liège, p. 44).

(4) Charleroi-Exposition, n° du 31 décembre 1910, P. 114; reproduit par le journal L'Indépendant, n0 22, de 1916.

(5) Fourche en bois avec deux dents très longues, dont servent les cultivateurs pour secouer la paille battue (ef dict. Liég., fig. 300).

(6) Le renseignement fantaisiste de BORBOUSE a été reproduit par AHASVERUS (revue Notre Hainaut, N° de septembre 1937, P.111 et par Albert JACQUEMIN. Terres et de Wallonie, Bruxelles,1936 , P.208.

(7) Le Doyen Crépin fait erreur lorsqu'il écrit dans Le Messager de Fosses du 19 janvier 1930, que ce n'est plus le lundi de la fête, mais un dimanche de carnaval que cette représentation a lieu. J'ai consulté à Haut-Vent de nombreuses personnes de tour âges et toutes m’ont déclaré de la façon la plus formelle qu'il m'y avait jamais eu de changement quant à la date de l’exhibition de la limodje. L'auteur a confondu avec une sortie carnavalesque à laquelle participait la limodje de Presles.

A Fosses-La-Ville, 

les deux siècles de la Limotche

 au quartier de Haut-Vent.

L’histoire est formelle : la légende de la Limotche prétend qu'un valet de ferme qui avait été licencié par son patron allait, la nuit, détruire les récoltes de tous les fermiers de la région. Ceux ci se liguèrent et allèrent par alternance surveiller leurs propriétés. Jusqu'au jour où ils finirent par découvrir l'auteur de ces méfaits. Avec les conséquences funestes pour le valet coupable. il promit de se corriger et tint parole. Depuis lors, chaque année au quartier du Haut-Vent, à Fosses-la-Ville on immortalise les rites de cette légende au cours des festivités de juillet, organisées, par le comité des fêtes, composé de MM. Boigelot, bourgmestre, président, Claude Lainé, secrétaire, Gérard Godefroid, vice-président, et Rudy Collignon, membre-commissaire. Pour célébrer le 200 anniversaire d'existence, le comité avait prévu un faste remarquable. Tout d'abord un livret signé Jacqueline Lainbert-Boigelot. Ensuite un très joli diminutif de la Limotche. L'un et l'autre ne pourraient que stimuler l'étude du folklore régional, surtout Si l'on sait que la Limotche de Haut-Vent est la première de toute l'Entre-Sambre et Meuse. De très nombreux invités étaient venus s'associer à la fête du 200e anniversaire:

les conseillers provinciaux MM. René Brachotte et Benoit Spineux, conseillers communaux; leurs collègues fossois MM. Clocheret, Crabeck et Viroux. Parmi l’assistance encore, M. Borbouse, commandant de la brigade de gendarmerie et M. Lainé, commissaire de police de Fosses-la-Ville ; M. Pol Lenoir, président du R.U.M.E.S.M. de Mettet, MM. et Mmes André Godefroid, Camille Godefroid, Nelly Possius, Marie-Rose Brichaux, Denise Collige, Edouard et Robert Meuter, Jules Lemière, Roland Migeot, Albert Franoeschini et Philippe Dujeux représentaient nombre de sociétés fossoises. M. Boigelot prononça le discours de circonstance et remercia chaleureusement ceux et celles qui animent le folklore régional. Une musique champêtre soutenait l'ambiance générale.

Pour la circonstance, Willy Gosset figurait la Limotche et Jean-François Godefroid en était le conducteur dompteur, Jean-Pol Georgery figurait le « valet de pique » et Medhy Defoin la hotte. Quant au « vétérinaire » , c'était Stéphane Lainé qui le représentait vétérinaire.

La journée du 200e anniversaire fut longue, très longue à travers les rues du quartier.

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La Limotche

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 La journée du 200e anniversaire

 

Venez à Fosses-la-Ville

au LAETARE...

les Chinels vous y invitent

Blottie dans sa cuvette, entourée de ses collines qui abritent sa douce quiétude, Fosses-la-Ville, vieille cité de la Principauté de Liège, semble jouer à colin-maillard avec les touristes.

L'ancienne cité fondée par saint Feuillen, au VIIe siècle, est située presque aux confins de l'EntreSambre-et-Meuse, a mi-chemin entre Charleroi où rougeoyant les fumées du Pays Noir et Namur aux mauves rives escarpées du Pays mosan.

Si notre petite ville wallonne semble étouffée et dépenaillée, s'il ne reste pas de vieux monuments à Fosses, c'est que ceux-ci furent détruits et pillés à maintes reprises par les armées. Après l'incendie et la dévastation, caque fois, les habitants, par prudence, relevèrent, dans un beau désordre, leurs modestes habitations serrées dans l'étau de leurs remparts. Seule, bâtie au centre de la ville, la collégiale la désigne au loin et c'est vers elle que les rues convergent. Son amusant clocher semble un doigt levé vers e ciel comme pour attirer l'attention du passant et l'inviter à venir parcourir ses venelles tortueuses et les étroites impasses de notre petite ville, orgueilleuse de sa situation et de son passe.

Mais subitement, dans ce milieu vivant de mille minuties, la cité paresseuse sort de sa somnolence et de sa toi peur. LAETARE ! REJOUIS-TOI ! claironnent les Chinels. Pour ceux qui ne les connaissent pas, voici quelques mots explicatifs au sujet des « Chinels de fosses ». C'est un groupe folklorique qui est un des plus beaux fleurons du Carnaval de Wallonie.

Il faut que le lecteur sache que l'on trouve dans les archives fossoises deux petites citations ayant trait aux comptes communaux. Ceux de 1736-1737 signalent « l'on a paré au maistre d'école six florins pour la comédie des carnavalles » qu'il avait sans doute dirigé cette année là ; ceux de 1739-1740 renseignent que l'on a donné « 15 florins aux jeunes hommes qui ont joué la comédie aux carnavalles ». A remarquer que la somme est plus importante.

Mais, me direz vous, il n'est pas fait mention des Chinels dans ces deux petits libellés. C'est vrai ! Elles ne disent pas non plus en quoi consistait cette comédie. Il faut remarquer aussi qu'un siècle plus tard, un historien fossois, Charles Kairis, qui a écrit en 1858 « Notice historique sur la ville de Fosses » et qui y traite des « fêtes publiques », ne décrit pas cette « comédie » alors qu'il parle des « Processions septennales » et de la « Limodje », deux autres manifestations folkloriques de notre cité. Il est vrai que le manque de documents n'est pas un argument péremptoire pour nier l'existence du fameux groupe de danseurs fossois.

Si l'histoire se refuse à donner une origine probante aux Chinels, la légende des « deux bossus » semble vouloir leur donner naissance bien que celle-ci soit connue en France, en Flandre et en d'autres lieux de Wallonie. Voici cette légende telle qu'elle est connue à Fosses

« Au temps où l'on croyait encore aux fées, vivait à Fosses un gentil petit bossu qui s'occupait de colportage dans la région.

» S'étant attardé plus qu'il ne fallait auprès de ses clients, il rentra, un soir, très tard. Si tard qu en passant au lieu-dit « Pont de l'Allou », il assista, interloqué, au sabbat des fées de la forêt. Celles-ci voulant le récompenser pour sa serviabilité, le débarrassèrent de sa difformité.

» Quand, le lendemain, un autre bossu de la région, méchant et haineux celui-là, eut vent de la chose, il se rendit dans la forêt à l'heure de minuit. Mal lui en prit. Il en revint affublé d'une seconde bosse, une devant et une derrière ».  Carnaval était proche. Les Fossois se moquèrent de lui. Ainsi serait né le « Chinel », le roi du carnaval de Fosses ».

Mais il est fort probable que c'est le souvenir d'une dictée donnée par l'instituteur Houdret, de Fosses et marquée par lui de la date de 1862 qui donna naissance aux « Dondons », les précurseurs des Chinels. Voici ce texte

« L'île des bossus .

... Simbad n'avait as fait quelques pas qu'une foule d'hommes et dé femmes s'étaient amassés autour de lui : singulières gens qui, tous, étaient bossus par devant et par derrière comme autant de Mayeux ou de polichinelles.

Il se sauva à grand peine dans un bois voisin, où il s'ajusta le mieux possible une double bosse qu'il s'était faite avec de la mousse... ».

M. Gallien.

Alexis Collard décrit dans « Quelques manifestations d'art populaire et de folklore » (In Entre-Sambre-et-Meuse, Namur, 1934) le costume des Doudous:

« Un pantalon de travail de toile bleue souvent usagé, très bouffant, afin de pouvoir introduire autour du bassin une quantité imposante de foin pour grossir le personnage...

» Ils étaient « costumés de toile grise, ou d'un « tricoté »... Cette veste très ample permettait le « rembourra~e nécessaire pour simuler une bosse devant et derrière. »

Il est possible que le « Chinel, abréviation de polichinelle » et son nouveau travesti aient été imites de l’œuvre de « Polichinelle » de J.L.E. Meisonnier (1815-1891) et qu'ils aient été lancés vers 1869, année où Louis Canivet, directeur de la Philharmonique fossoise, composa la musique de la nouvelle danse et remplaça les pas primitifs des rigodons des doudous. Cela donnerait plus de 125 ans d'âge aux Chinels. Cette partition légère et entraînante se compose de quatre figures : essai, ballet, rigaudon et carnaval. passage, « La Sabotière », imite les claquements faits en sautillant avec des sabots; un autre est dit « à surprise », ici, subitement, la musique s'arrête et les danseurs restent figés dans leur dernière position.

Que dire de la danse des Chinels ?

Tout le monde s'accorde pour les admirer dans leurs gracieuses évolutions. Ils dansent, virevoltent, s'entrecroisent en des entrechats où la légèreté et la grâce, alliée aux couleurs chatoyantes de leurs travestis forment avec les notes allègres des musiciens un tableau merveilleux qui a déjà tenté maints artistes. Car, si la musique est légère et entraînante, les costumes, eux, sont du plus bel effet. Comme le polichinelle, nos danseurs sont vêtus d'un costume dont les couleurs changent d'une soce à l'autre. Il faut savoir que c'est seulement depuis 1928 que les différents groupes « spontanés » s'associent pour constituer une société. Revenons à ce costume. Deux bosses effilées et courbées, vers le bas pour celle de devant, vers le haut pour celle de derrière, garnissent leur tunique. Celle-ci est faite, actuellement, de velours et de satin où se conjuguent le vert et le rouge, le rose et le mauve, le noir et le jaune et se termine par des dentelures auxquelles sont attachées des « chêlètes ».

Des souliers fins ornementés d'une rosette remplacent les sabots que portent les Doudous. Les jambes du pantalon sont serrées au-dessus du genou et le bas des jambes se terminent aussi par des dents agrémentées de minuscules clochettes. Une blanche fraise avec galon doré enserre le cou. La coiffure est un haut bicorne enjolivé et surmonté d'une aigrette.

Enfin, ils manient avec grâce un sabre de bois, recourbé comme un cimeterre avec lequel ils marquent la cadence et qui leur sert surtout à « sabrer ».

Si le Gille lance des oranges ; si, à Malmédy, les « Haguettes » se mettent en oeuvre ; si les « Blancs moussîs » de Stavelot ont leur vessie et leurs confettis ; etc. ; le Chinel tient essentiellement à respecter deux coutumes.

La première est le « sabrage des filles ». Quittant la danse, le Chinel s'approche d'une dame qu'il veut honorer ; brusquement, il se retourne et de la pointe de son sabre, if lui caresse les mollets ; puis, la quittant en souriant, il la salue de son arme.

La deuxième est le « coup de bosse ». Le Chinel a remarqué le cigare ou la pipe qui orne la bouche d'un spectateur ; virevoltant subitement devant celui-ci, il enlève de la pointe de sa bosse arrière l'objet des lèvres du quidam qui ne s'y attend pas. Il existe toujours un groupe de Doudous fidèles à l'ancienne tradition. Leur costume blanc rembourré de foin leur fait d'énormes gibbosités. Cette tunique est ornée de grosses pastilles ou de macarons rouges. Ils sont chaussés de sabots dont la pointe recourbée vers le haut revient vers le cou-de-pied.

Au lieu des rigodons primitifs, ils exécutent la même danse que les Chinels.

La renommée des Chinels de Fosses n'est as surfaite. Leur notoriété est si bien établie qu'ils sont demandés régulièrement dans les villes de Belgique et qu'ils ont montré leur talent en France, et Espagne, en Italie, en Angleterre, en Hollande et même au Japon.

Nous formons le vœu de les entendre chanter, longtemps encore, la chanson que François Gailly leur a dédiée en 1887

LÈS CHINELS FOSSWÈS

Alans tos lès Chinèls

Fioz ranchi vos galziènes !

C'èst l' djoû do Létâré

I faut sawè sâbrer !

 

Eûchiz sogne, d' timps-in-timps,

D' lètchi on p'tit vèrkin.

Ça r'tchaufe lès-intèstins

Po r'comincî l' lèdmwin !

 

La relève est assurée car, chaque année, de nombreux arçons se sentent des fourmillements dans les jambes en entendant les premières mesures de l'air « national » fossois... Le petit « vèrkin », ce sera pour plus tard !

Notons que différents artistes peintres ont été tentés par le costume et le trémoussement des Chinels. Citons entre autres : Fernand Verhaegen, Albert Chapeveyer, G. Simon et O.H. Boseret.

Le Syndicat d'Initiative de Fosses-la-Ville a fait ériger un « Monument au Chinel » qui est l’œuvre d'un artiste-dinandier fossois : Marcel Nulens.

Ajoutons qu'un disque 45 tours, « Les Chinels de Fosses » (enregistrements Paul Tassier, Bruxelles) est en vente à la Société.

M. Chapelle.

Folklore fossois : les Chinels

Dans son aspect actuel, le chinel semble être un descendant du Pulchinella de la Comédie del Arte. Mais au début, à Fosses, le costume était de toile grossière et bourré de paille et de foin : c'était le "Doudou" qui dansait le rigaudon, sabots aux pieds, au son des fifres et des tambours.

Si l'histoire se refuse à donner une origine probante aux Chinels, la légende des "Deux Bossus" semble vouloir leur donner naissance bien que celle-ci soit également connue en France, en Flandre et en d'autres lieux de Wallonie. Voici cette légende, telle qu'elle est racontée à Fosses :

Au temps où l'on croyait encore aux fées,

vivait à Fosses un gentil petit bossu qui s'occupait de colportage dans la région. S'étant attardé plus qu'il ne fallait auprès de ses clients, il rentra un soir, très tard. Si tard qu'en passant au lieu-dit "Pont de l'Allou", il assista, interloqué, au sabbat des fées de la forêt. Celles-ci, voulant le récompenser pour sa serviabilité, le débarrassèrent de sa difformité.

Quand le lendemain, un autre bossu de la région, méchant et haineux celui-là, eut vent de la chose, il se rendit dans la forêt à l'heure de minuit. Mal lui en prit. Il en revint affublé d'une seconde bosse, une devant et une derrière. Carnaval était proche. Les Fossois se moquèrent de lui. Ainsi serait né le "Chinel", le roi du carnaval de Fosses.

Le costume est fait de deux bosses, effilées et courbées, vers le bas pour celle de devant, vers le haut pour celle de derrière. La tunique est de velours et de satin, où se conjuguent le vert et le rouge, le rose et le mauve, le noir et le jaune, et se termine par des dentelures auxquelles sont attachées des "chîlètes". Des souliers ornementés d'une rosette remplacent les sabots que portaient les Doudous. Une blanche fraise avec galon doré enserre le cou. La coiffure est un haut bicorne enjolivé et surmonté d'une aigrette. Le chinel manie avec grâce un sabre de bois, recourbé comme un cimeterre, avec lequel il marque la cadence.

 

Photo 3

 Les Chinels place du marché