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Mise à jour : 03/07/2008 18:34:57

ARCHITECTURE  DES GARES  EN  BELGIQUE (1835-1914)

DES CHEMINS DE FER AUX CHEMINS VERTS

 

ARCHITECTURE DES GARES

EN BELGIQUE (1835-1914 )

Dans le courant du mois, les éditions Brepols vont publier le premier tome d’un ouvrage consacré à l'architecture des gares belges. Cette première partie couvre la période allant de l’avènement des chemins de fer à la veille de la Première Guerre mondiale. Le présent article en propose un aperçu axé sur l’architecture des gares des chemins de fer de l’État. Un second article sera publié ultérieurement sur l’architecture des gares des sociétés particulières.

LES PREMIÈRES LIGNES DE CHEMIN DE FER

Le 1er mai 1834, le parlement belge approuvait une loi relative à la construction d'un réseau ferroviaire. Cette loi prévoyait l'aménagement d'un réseau en étoile dont Malines était le point central. A l'ouest, le réseau ferroviaire s'étendait jusqu'à la frontière allemande en passant par Louvain, Tirlemont, Liège et Verviers. Au nord, il se dirigeait vers Anvers. Il était encore possible de rallier le port d'Ostende via Termonde, Gand et Bruges. Enfin, une ligne permettait aussi de se rendre vers les villes hennuyères et la frontière française.

Un an plus tard, le 5 mai 1835, la ligne de chemin de fer reliant Bruxelles et Malines était inaugurée en grande pompe. Le 26 mai 1837, une loi complémentaire était votée en vue de l'aménagement des lignes Gand-Courtrai-Tournai et Braine-le-Comte-Manage-Charleroi-Namur.

En 1843, les objectifs de la loi étaient atteints et l'État possédait 559 km de voies.

LES PREMIÈRES GARES

Le néo-classicisme était le style le plus répandu au début du XIXe siècle. Ce style utilisait principalement des éléments de l'architecture romaine et grecque et privilégiait l'harmonie,

les formes linéaires et la symétrie. Il connut son apogée lors de l'avènement des chemins de fer en Europe occidentale. Il était dès lors logique qu'il devint la norme appliquée pour les premières gares des nouvelles compagnies ferroviaires de notre pays. A l'exception de Gand-Sud, Bruxelles-Bogards, Ostende, Bruges, Tournai et Mons, les premières gares furent construites en dehors des murs de la ville. En effet, à l’époque, la Belgique était toujours soumise au droit de concession, et il fallait donc acquitter un péage aux portes de la ville.

On ne connaît pas avec certitude l'identité des architectes qui construisirent les premières gares. Certains attribuent ces oeuvres à l'ingénieur De Ridder, d'autres à Poncelet. La première gare fut construite à Malines (1837). Il s'agissait d'un bâtiment sobre comprenant en son centre une aile à deux niveaux sous un toit en pavillon et de chaque côté, une aile recouverte d'un toit « à bâtière ». Au rez-de-chaussée, le bâtiment était doté de portes et de fenêtres cintrées, et au premier étage, de fenêtres rectangulaires. Au-dessus du toit en pavillon trônait une tour à quatre horloges. Les gares de Louvain et Tirlemont étaient également dotées d'une tour à horloge, ce qui laisse penser que les plans de ces édifices étaient l'oeuvre de la même personne.

En 1841, Auguste Payen (1801-1877) entrait au service des Chemins de fer de l'État. Si l'on en croit son biographe, E.-J. Soil, Payen conçut les gares de Wetteren, Gand-Sud, Bruges, Ostende, Louvain (?), Manage, Lierre, Verviers-Ouest, Pepinster et Bruxelles-Midi. Cette liste doit toutefois être considérée avec les réserves d'usage. En effet, la gare de Louvain fut mise en service avant la désignation de Payen. Comme Payen a dessiné la gare de Pepinster, il est fort probable qu'il a aussi signé celle de Chaudfontaine, qui est quasiment semblable. Les gares d’origine de Wetteren et Borgworm étaient, elles aussi, presque identiques. Quant à la gare de Braine-le-Comte, elle était presqu’achevée au début de sa carrière. Il est cependant un fait que plusieurs autres gares furent réalisées de son vivant, comme Termonde, Hal, Soignies, Forest- Midi, Bruxelles-Bogards, Tubize, Liège, Tournai, Aalter, Vilvorde, Châtelineau-Châtelet, Jurbise et Écaussines.

À CHAQUE STYLE, SON ARCHITECTE

Au milieu du XIXe siècle, l'architecture suivit deux tendances antagonistes. L'une puisait son inspiration dans l'héritage gréco-romain (néo-classicisme) tandis que l'autre se basait sur des styles historiques à part entière (néo-renaissance). Pendant la période 1860-1875, plusieurs gares furent construites en style néo-renaissance flamande. Le nouveau style contrastait fortement avec le néo-classicisme en vogue à l'époque. L'architecture des gares passa sans transition des murs recouverts de plâtre, des colonnes, des frontons et des arcades à d'imposants bâtiments en briques caractérisés par une profusion de pignons à redans. Après presque trente années d'histoire des chemins de fer, il n'y avait toujours pas de place pour la fonctionnalité et la symétrie imposait sa loi tous azimuts.

Dans les années 1860, plusieurs gares de la période initiale n'étaient déjà plus en mesure de faire face à la croissance du trafic ferroviaire. De plus, plusieurs constructions provisoires devaient être remplacées d'urgence. Ce fut le cas pour les gares de Oude-God, Ensival, Ezemaal, Floreffe, Gingelom, Jeuk-Roost, Vertrijk, Malderen, Haacht, Wespelaar-Tildonk, Lembeek, Hennuyères, Boussu, Gouy-lez-Piéton, Pont-à-Celles (Nord) et Auvelais. Après l'ouverture d'une ligne directe Bruxelles-Louvain en 1866, l'État construisit des gares avec pignons à redans à Diegem, Zaventem et Kortenberg. Des gares du même style furent aussi construites le long des lignes Hal-Ath et Bruxelles-Charleroi. Cette période fut également marquée par la construction de gares monumentales. La gare de Bruxelles-Midi (1869) fut encore été érigée dans un style purement néo-classique. La gare de Bruxelles-Nord, dont Léopold Ier posa la première pierre en 1841, était presque complètement achevée en 1862. En fait, cette gare annonçait la période éclectique. L’éclectisme désigne l’emprunt par les architectes de divers éléments de style. Il est établi avec certitude que l'architecte Lambeau des chemins de fer de l'État dessina les gares de Liège-Guillemins (1864) et de Namur (1864). Comme il est probablement aussi le concepteur des gares de Mons (1870) et de Charleroi (1874). Toutes ces gares laissaient clairement transparaître des influences françaises. Henri Beyaert (dont l'effigie figurait sur le billet de 100 francs) et Émile Janlet sont en général considérés comme les fondateurs du style renaissance flamande. Ils souhaitaient créer un style propre en recourant à des éléments historiques et à des matériaux du pays. Ils ont chacun conçu une gare:

Tournai pour Beyaert et Malines pour Janlet. Pourtant, tous deux abhorraient les dogmes architecturaux. À Tournai, Beyaert utilisa encore divers éléments de la renaissance française et Janlet réussit à exploiter avec raffinement des matériaux aussi modernes que le fer dans son projet de gare pour Malines. De 1879, année de l'inauguration de la gare de Tournai, jusqu'en 1913, année de la mise en service de la gare de Malines-Nekkerspoel, les Chemins de fer de l'État utilisèrent surtout des concepts de style néo-renaissance flamande.

L'architecte Henri Fouquet en fut un autre représentant majeur. Il érigea les gares de Louvain, Nieuport-Bains, Oostkamp, Hal, Soignies, Harelbeke et Audenaerde. Les Chemins de fer de l'État édifièrent également quelques gares de style néo-gothique à Bruges, Furnes, Binche, Liège-Palais, Ostende-Ville et Gand-Saint-Pierre. L'art nouveau, qui propulsa la Belgique à l'avant-plan de la scène architecturale, marqua également les Chemins de fer de l'État de son empreinte.

LA CATHÉDRALE FERROVIAIRE

Il est impossible d'ouvrir un ouvrage de référence concernant l'architecture des gares sans trouver une allusion à la cathédrale ferroviaire d'Anvers. Le bâtiment de bois de 1854 avait atteint ses limites depuis longtemps. Dans un premier temps, l'architecte anversois Ernest Dieltens dessina les plans d'une nouvelle gare. Il puisa son inspiration du côté de Francfort et de Strasbourg. Finalement, le travail fut confié au Brugeois Louis Dela Censerie. Celui-ci acquit sa notoriété grâce à des projets                  néo-gothiques. Pour la gare d'Anvers, il opta toutefois pour un style néo-baroque, inspiré en droite ligne de la gare de Lucerne dont finalement Anvers-Central n’est qu’une version agrandie.

L'ingénieur Clément Van Bogaert conçut le hall de la gare. Les travaux furent entamés aux environs de 1895. Parallèlement à la construction de la nouvelle gare d'Anvers, la voie en anneau fut rehaussée, ce qui nécessita la construction d'une nouvelle gare à Berchem et le déplacement de la gare à Anvers-Dam. La gare se composait de trois parties. La première partie comprenait les maçonneries inférieure et supérieure sur lesquelles les quais reposaient. Ces quais étaient prolongés par une berme ferroviaire rehaussée par des murs de soutènement maçonnés, appelés centers par les Anversois. Une deuxième partie était constituée par le hall tandis que le bâtiment de gare proprement dit formait la troisième partie.

En 1898, une adjudication fut lancée pour ledit bâtiment de gare. C'est aux environs de 1899 qu'un service de trains provisoire fut mis en place sous le hall. En 1905, la gare était complètement terminée.

CONCEPT  STANDARD

Les grandes gares étaient des gares de 1re ou de 2e classe. A la fin des années 1870, l'État appliqua un concept standard pour les gares de 3e, 4e et 5e classe. Une gare se composait de trois parties, avec au milieu une partie à deux niveaux, flanquée d'un côté d'une aile basse recouverte par un toit plat et de l'autre côté, d'une aile basse recouverte d'un toit « à bâtière ». Les Chemins de fer de l'État avaient prévu à l'attention de leur personnel un logement de fonction qui était spacieux pour l'époque. L'étage inférieur de la partie médiane du bâtiment était partiellement réservé à la famille du chef de gare.

Un bureau avec des guichets était installé dans l'autre partie. Les chambres à coucher se trouvaient au premier étage. L'aile basse coiffée d'un toit plat était aussi destinée à la famille du chef de gare tandis que l’autre aile était réservée au service voyageurs. C'est là que se trouvait la salle d'attente pour les voyageurs de 3e classe. Parfois, une salle d'attente séparée était prévue pour les voyageurs de 1re et de 2e classe. Un magasin était parfois aussi aménagé pour le service des colis.

A l'origine, les architectes des différents groupes concevaient un bâtiment spécifique à leur groupe. Le projet du groupe Bruxelles-Midi devint, à partir de 1881, la référence pour toute la Belgique. En 1895, elle fut quelque peu adaptée. L'aile basse à toit plat fut remplacée par une aile recouverte d'une toiture «à bâtière». Cent quarante-trois gares des deux variantes ont été inventoriées. Hormis Zingem et Olsene, toutes ces gares furent construites avant 1914.

GARES, ARRÊTS  ET  POINTS  D'ARRÊT

Il faut savoir que l'État établit une distinction entre une gare, un arrêt et un point d'arrêt. Les gares offraient un service de trains régulier aux voyageurs, ainsi qu'une infrastructure pour le service des marchandises. Devant le bâtiment se trouvait une place, généralement prolongée par un terrain à marchandises clôturé. En principe, une voie de garage était également aménagée à cet endroit. En fonction des besoins locaux, la gare comprenait aussi une cour à marchandises, un quai de chargement, une plate-forme de chargement et un pont bascule.

Un arrêt assurait un service de trains plus ou moins régulier pour les voyageurs. Il était toujours pourvu d'un bâtiment et d'une place. Le bâtiment était divisé en quatre parties : une zone à fonction d'habitation, un bureau, une salle d'attente et un magasin pour le service des colis.

Un point d'arrêt n'était qu'un simple petit quai situé au croisement d'une route, la plupart du temps à proximité de l'habitation d'un garde. Les billets étaient achetés à bord du train. Généralement, seul un nombre limité de trains s'y arrêtaient. En principe, un point d'arrêt n'avait pas de bâtiment attitré. Parfois, l'État y érigeait une petite construction dans la perspective d'une éventuelle extension.

Vers la fin des années 1890, l'État adopta une norme pour les bâtiments des points d'arrêt. Il s'agissait d'un bâtiment simple et de dimensions réduites qui devait être presque toujours agrandi car il s'avérait rapidement trop petit. On en a répertorié une vingtaine de ce type.

A partir de 1893, l'État mit en service un nouveau type de construction pour les points d'arrêt. Deux prototypes furent érigés à Dolhain-Vicinal et Profondsart, le projet définitif vit le jour à Carlsbourg. Dans ses grandes lignes, le concept est identique à celui de 1881. Un bâtiment à étage était flanqué d'une aile basse surmontée d'un toit en bâtière, ainsi que d'une aile basse en forme de L. Une moitié de l'étage inférieur de la partie centrale était réservée à la famille du chef de gare tandis que l'autre moitié était aménagée comme bureau avec guichet. Les chambres à coucher se trouvaient à l'étage. L'aile basse en forme de L faisait, quant à elle, office de pièce de séjour. Côté quai, cette aile était protégée par un muret muni d'une porte donnant accès à une petite cour. L'autre aile comprenait une salle d'attente pour les voyageurs et un magasin pour le service des colis. Jusqu'en 1914, on construisit au moins cent cinquante bâtiments de ce type dans les points d'arrêt.

À suivre…

Le premier tome de l’ouvrage Architecture des gares en Belgique comprend quelque 200 pages et est agrémenté de 800 photos. Il peut être commandé aux éditions Brepols contre paiement d’une somme de 45,00 euros (40,50 euros pour les cheminots actifs et pensionnés).

Architecture des gares en Belgique

Hugo De Bot, traduit par D. Verhagen Brepols Publishers. Begijnhof, 67 à 2300 Turnhout.

Tél.: 014/44 80 20; Télécopie: 014/42 89 19.

 info.publishers@brepols.net

« Le rail »Mensuel des œuvres sociales de la SNCB octobre 2002

Auteur: H . D e B o t

Anvers central façade du coté du jardin zoologique

 

Point d’arrêt de Kemzeke   Gare d’Anvaing   Gare de Hal

 

                                         Gare de Liège-Guillemins   Gare de Lierre   Gare de Tirlemont

     

ARCHITECTURE DES GARES

EN BELGIQUE (1835-1914 )

Après avoir abordé, le mois dernier, l’architecture des gares des chemins de fer de l’État, passons maintenant aux compagnies particulières.

LES  PREMIÈRES  COMPAGNIES  DE  CHEMIN  DE  FER

Dans notre pays, les premiers chemins de fer furent aménagés par l’État, contrairement à la plupart des nations voisines. La Chambre fut d’ailleurs le théâtre de débats houleux entre partisans et adversaires d’un service public de chemins de fer. Les grandes lignes furent donc posées à l’initiative de l’État jusqu’en 1844, date à laquelle les sociétés particulières prirent la relève pour poursuivre le maillage du réseau.

Toutefois, entre 1843 et 1870, quelques rares lignes nouvelles furent encore installées par l’État, lequel accorda encore par la suite, des concessions pour l’aménagement de lignes contre paiement d’un montant fixe. L’État assurait lui-même l’exploitation de ces lignes. Si l’on excepte quelques lignes industrielles du Borinage, c’est la liaison Anvers-Gand qui fut la première à être aménagée au moyen de financements privés. À l’époque, la compagnie d’Anvers à Gand utilisait un concept distinct pour chaque gare tandis que celle de L’Entre-Sambre-Meuse proposait, pour la première fois, un modèle de gare standard. La compagnie Flandre Occidentale lui emboîta le pas à partir de 1853. La longueur du bâtiment variait cependant en fonction de l’importance de la gare. Les gares de l’Entre-Sambre-et-Meuse et de la Flandre Occidentale arboraient des éléments de style néo-classique.

De 1853 à 1856, la société Dendre-et-Waes construisit de Ath à Denderleeuw une ligne de chemin de fer comprenant diverses bifurcations, entre autres vers Bruxelles, Alost, Termonde et Lokeren. Cette compagnie fit appel aux services de Jean-Pierre Cluysenaar, architecte réputé. Il dessina dix sept gares différentes, la plupart de style néo-renaissance flamande. La gare restaurée et classée d’Alost témoigne du raffinement de Cluysenaar sur le plan architectural.

En 1846, la Grande Compagnie du Luxembourg reçut une concession pour l’aménagement d’une ligne de Bruxelles à Luxembourg. Le premier tronçon entre le Quartier Léopold et la Hulpe ne fut mis en service qu’en 1854. Il fallut attendre 1858 pour que la ligne rejoigne enfin Arlon. Par la suite, la compagnie acquit aussi des concessions de Marloie à Liège, d’ Arlon à Athus et de Libramont à Bastenaken. Elle érigea des gares de style néo-renaissance italienne à Assesse, Jemelle, Ciney, Natoye et Habay. Les gares de Barvaux, Bomal, Chastre, Esneux, Mont-Saint-Guibert, Rhisnes, Saint-Denis-Bovesse et Tilff étaient du même type. Comblain-la-Tour, Bernimont, Wideumont, Morhet, Sibret et Bastenaken se virent doter d’une gare identique.

LES  FUSIONS

Les années soixante du XIXe siècle furent caractérisées par des fusions d’exploitations. À la fin de cette décennie, quatre compagnies privées de chemin de fer dominaient le paysage ferroviaire belge. Le Grand Central Belge exploitait surtout des lignes dans les provinces d’Anvers, du Brabant et du Hainaut oriental. La Société Générale d’Exploitation gérait un réseau ferroviaire d’environ 1 000 km en Flandre orientale et occidentale ainsi que dans le Hainaut occidental. En 1871, l’État racheta 600 km de lignes pour des raisons de concurrence. Entre-temps, les banquiers français avaient acquis des exploitations importantes telles que Namur-Liège, Charleroi-Erquelinnes et Mons-Quévy. Ils exploitaient ces lignes sous le nom de Nord-Belge. Ils contrôlaient également la société Liège-Maastricht et la Compagnie de Chimay. Le quatrième grand acteur présent sur la scène ferroviaire était la Grande Compagnie du Luxembourg. L’État racheta cette compagnie en 1873. L’existence de la Société Générale d’Exploitation fut bien trop courte pour pouvoir développer une architecture de gare spécifique. Il en fut tout autrement pour le Grand Central Belge, cette société n’étant rachetée qu’en 1898. La société Nord de la Belgique fit l’acquisition de la concession des lignes Anvers-Hasselt et Turnhout-Tilburg. La compagnie en céda toutefois l’exploitation au Grand Central Belge. Sur cette ligne, la société construisit des gares identiques à Boechout, Berlaar, Heist-op-den-Berg, Booischot, Testelt, Zichem, Zelem, Schulen, Kermt, Alphen (NL) et Riel (NL).

Le Grand Central Belge remplaça aussi plusieurs gares des compagnies initiales. Ce fut notamment le cas à Berzée, Ham-sur-Heure, Ransart, La Sambre, Tilly, Jamioulx et Charleroi (Ville-Basse). Pour ces gares, le Grand Central Belge conçut un projet standard. La longueur du bâtiment était proportionnelle à l’importance de la gare. Lors de la construction de la ligne Anvers-Mönchengladbach en 1878-1879, on érigea des gares à Olen, Geel, Mol, Balen-Wezel, Lommel, Neerpelt, St-Huibrechts-Lille et Hamont. Aux Pays-Bas également, le Grand Central Belge édifia des gares à Budel, Weert, Baexem, Haelen, Melick-Herkenbosch et Vlodrop.

Diverses compagnies de plus petite envergure, comme Hesbaye-Condroz, Liégeois-Limbourgeois, Spa frontière grand ducale, Malines - Terneuzen, Gand - Terneuzen, Eeklo - Bruges, Hasselt - Maeseyck ainsi que la Compagnie de Chimay conçurent également un modèle de gare standard.

LE NORD-BELGE

Le 28 juin 1854, la Compagnie du Nord conclut un accord avec les propriétaires anglais de la Compagnie de Namur à Liège et de Mons à Manage en vue de l’exploitation de la ligne Namur-Liège. Le 3 novembre 1854, un nouvel accord fut signé avec la Compagnie du chemin de fer de Charleroi à la frontière de France pour l’exploitation de la ligne Charleroi- Erquelinnes. Le 4 juin 1854, un accord fut passé avec la Compagnie du chemin de fer de Mons à Hautmont et la Saint-Ghislain pour l’exploitation de la ligne Mons-Quévy- Hautmont. À la même date, la Compagnie du Nord concluait également un accord avec la Compagnie de Namur à Liège et de Mons à Manage en vue de l’exploitation de la ligne Namur-Dinant-Givet, qui devait être encore aménagée. Tout l’environnement du Nord-Belge - les gares, les signaux, les passages à niveau, les locomotives, les voitures et les wagons était typiquement français. Même l’emploi des langues au Nord-Belge était différent de celui en vigueur à l’État. Au Nord-Belge, on parlait d’un bâtiment voyageur et à l’État, d’un bâtiment de recettes. Les modèles de gare du Nord-Belge étaient également en usage à la Compagnie du Nord. L’architecture des plus grandes gares était indéniablement d’inspiration française. Ainsi, la façade de la gare de Liège-Longdoz fait d’emblée penser à la gare du Nord à Paris tandis que la gare de Huy est une version réduite des gares de Tourcoing et d’Arras.

Les plans des gares de taille plus modeste venaient généralement de France, où la Compagnie du Nord avait adopté un même type de bâtiments. Vingt-huit gares similaires furent construites à Amay, Ampsin, Andenne-Seilles, Bas-Oha, Dave, Engis, Flémalle-Grande, Fontaine-Valmont, Godinne, Hastière, Hermalle-sous-Huy, Jambes, Jemeppe-sur-Meuse, Landelies, Lobbes, Lustin, Marche-les-Dames, Marchienne-Zone, Namèche, Ougrée, Sclaigneaux, Seraing, Solre-sur-Sambre, Statte, Thuin-Nord, Tilleur, Val-Saint-Lambert et Yvoir.

RACHAT

En 1868, les plans de la Compagnie de l’Est française visant à reprendre la ligne de Luxembourg provoquèrent un grand émoi à la rue de la Loi. Étant donné la tension régnant entre la France et l’Allemagne, la Belgique risquait involontairement de se retrouver impliquée dans le conflit. Le 1er janvier 1873, l’État racheta la concession.

Le parlement décida qu’à l’avenir, aucune nouvelle concession ferroviaire ne serait en principe accordée. Pire encore, en raison de difficultés budgétaires rencontrées, toutes les concessions seraient progressivement rachetées. Un certain temps s’écoula toutefois avant que ces projets soient mis à exécution. Lorsque la Première Guerre mondiale éclata, il restait encore trois compagnies, à savoir le Nord-Belge, Malines - Terneuzen et la Compagnie de Chimay.

Une convention/loi vit le jour lors de l’approbation de la loi du 3 juin 1870 en vue de la reprise des lignes du consortium bâti autour de la Société Générale d’Exploitation et de la Compagnie des Bassins Houillers du Hainaut. L’État et les Bassins Houillers du Hainaut convinrent que cette dernière société exécuterait encore toutes les concessions déjà accordées. Après livraison, l’État prendrait l’exploitation à sa charge. En 1877, les Bassins Houillers du Hainaut firent cependant faillite après n’avoir respecté qu’une petite partie seulement des obligations de la convention/loi.

A partir de 1873, les compagnies particulières se virent imposer un modèle de gare par l’État. Que ce soit pour l’aménagement de lignes sous le régime des concessions ou contre un montant fixe, on utilisait donc un modèle standard. En 1872, un concept présentant les mêmes caractéristiques de style était déjà utilisé pour les lignes des Chemins de fer des Plateaux de Herve. En 1873, les lignes ferroviaires Trazegnies-Courcelles-Centre, Dour-Quiévrain, Marbehan-Virton furent mises en service et de nouvelles gares créées à Courcelles-Centre, Dour, Élouges, Sainte-Marie, Ethe et Virton.

La première variante, introduite en 1873, était caractérisée par l’utilisation d’une clé de voûte dans les portes et les fenêtres. La seconde variante, sans clé de voûte, fut adoptée pour la première fois en 1876 à Erpe-Mere. Les dernières gares de ce type (Ruien, Berchem-Audenarde et Melden) datent de 1890. Denée-Maredsous, Falaën Warnant furent les dernières gares de la première variante. Jusqu’en 1890, les deux variantes étaient utilisées indistinctement. Dans les gares d’une même concession, les détails étaient généralement identiques. Soixante-quatre gares de la première variante et cinquante-trois de la deuxième ont été répertoriées.

A l’exception de quelques lignes industrielles, la liaison Anvers-Gand fut la première à être aménagée au moyen de financements privés

 

« Le rail »Mensuel des œuvres sociales de la SNCB novembre 2002

Auteur: H . D e B o t

Gare de Bas-Oha

Gare de Bas-Oha

 

Gare de Geel   Gare de Poperinge   Gare d’Alost

                   Gare de Bomal   Gare de Bourcy   Gare de Boechout

   Gare de Braine-le-Château

   

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DES CHEMINS DE FER  AUX CHEMINS VERTS

Nul n’ignore plus l’existence de ces chemins du rail que l’on peut parcourir à pied, à vélo, à trottinette ou en rollers. Ce que l’on sait peut être moins, c’est qu’ils sont à la base de l’Association européenne des voies vertes (AEVV), fondée en mai 1997 lors des premières rencontres européennes du Trafic lent et des Chemins du rail. À peine un an plus tard, les statuts de ce nouveau né étaient signés par dix-sept représentants d’institutions et d’associations de plusieurs pays européens.

Pour mémoire, l’association Chemins du rail est née à Namur en janvier 1996. Son objectif, qu’elle poursuit toujours activement, est de mettre en valeur les lignes de chemin de fer désaffectées et de les transformer en « voies vertes » pour tous les usagers non motorisés.

Elle s’attache également à la sauvegarde du patrimoine ferroviaire. Son champ d’action concerne à la fois la Wallonie, dans le cadre du RAVeL ou hors RAVeL, et les autres régions ou pays d’Europe.

Quant au RAVeL, il s’agit d’un projet du gouvernement de la Région wallonne qui vise à aménager, pour les mêmes usagers, 900 Km de lignes ferroviaires désaffectées, 300 Km de lignes secondaires (chemins de fer vicinaux) et 600 Km de chemins de halage.

Les Chemins du rail proposent encore leurs services aux organismes publics pour différents types de missions entrant naturellement dans ses compétences. Ils ont notamment réalisé des études d’aménagement dans le Parc naturel de la Haute Sambre, procédé à la consultation des riverains relativement aux agencements des lignes 119, à Charleroi, et 142, entre Namur et Éghezée, et élaboré un dictionnaire du patrimoine ferroviaire en collaboration avec la Région wallonne et le programme européen Leader II. On l’a donc compris : l’idée à la base de ces initiatives est de restaurer ou desauvegarder des infrastructures désaffectées (voies de chemin de fer, chemins de halage, chaussées romaines…) et d’en limiter l’accès au seul trafic non motorisé.

Ces voies lentes contribuent ainsi non seulement au maintien d’un patrimoine dont nul ne saurait contester la valeur historique mais aussi à la préservation de sites naturels, par la conservation de « couloirs écologiques ».

UNE STRUCTURE BIEN FICELÉE

Outre ses statuts, l’Association européenne des voies vertes a adopté, en janvier 1998, à Namur, une résolution complémentaire Résolution de Logroño qui éclaire, de façon éloquente, sa philosophie.

Les caractéristiques communes auxquelles doivent répondre les infrastructures destinées à être aménagées en voies vertes y sont par exemple détaillées. On retiendra notamment la facilité du parcours (pas de pente ni de difficultés excessives), sa sécurisation (qualité des surfaces de roulement et de promenade, éclairage dans les tunnels,…), la continuité de l’itinéraire par des solutions adaptées ainsi que le respect de l’environnement, de la culture, des productions, des particularismes et des patrimoines régionaux.

L’Association y exprime également son souci de promouvoir le développement des régions rurales ou en crise et de favoriser la création d’emploi local (hébergement des usagers, entretien des infrastructures, assistance technique, signalisation, organisation d’activités culturelles,…) .

SUR LE TERRAIN

L’Association européenne des voies vertes milite sur tous les fronts : en avril dernier, elle a notamment participé à la Semaine verte, une organisation de la DG-Environnement de la Commission européenne, permettant de faire connaître la politique et les activités de l’Union européenne en matière d’environnement. Dans ce cadre, l’AEVV a déposé le projet REVER MED (Réseau vert européen pour l’espace Méditerranée) qui vise à élaborer un schéma directeur pour l’espace en question et à réaliser des études de faisabilité d’itinéraires longue distance ainsi que des études détaillées de section d’itinéraires.

Le projet est ambitieux mais combien séduisant : l’idée est de développer depuis le sud du Portugal jusqu’au sud de l’Italie, en passant par les régions méditerranéennes de l’Espagne et de la France, plus de 10 000 kilomètres de parcours réservés aux usagers non motorisés et basés principalement sur les voies vertes. Ces 10 000 kilomètres sont répartis de la manière suivante : 950 au Portugal, 4 765 en Espagne, 2 385 en France et 2 185 en Italie. Ce projet, coordonnée par l’AEVV, associe plus de trente membres représentant les différentes régions et institutions des quatre pays participants.

A terme, c’est toute l’Europe qui devrait être quadrillée par un réseau de voies vertes par la volonté de dégager une synergie entre tous les projets dont REVER AMNO, déjà en marche pour le Nord-ouest de l’Europe. Enfin, l’AEVV organise, avec le soutien notamment de la Commission européenne, le Prix européen des voies vertes qui sera décerné à une réalisation exemplaire intégrant les différentes caractéristiques de ce type d’itinéraires et proposant des qualités intrinsèques particulières en faisant un modèle du genre. Elle devra en outre répondre à deux exigences particulières : rencontrer un succès populaire et contribuer au développement durable.

DE QUELQUES INITIATIVES LOCALES

En Espagne, chaque année, la Fundación Española de Ferrocarriles (FFE) fête la Journée des Voies vertes : à cette occasion, plus de vingt Voies vertes organisent des fêtes, des marches et des repas populaires ainsi que des activités pour les jeunes dans le but de faire connaître les possibilités qu’offrent ces routes. Le tracé de celles-ci figure maintenant dans la nouvelle édition 2002 de la Carte officielle de Routes (tant dans la carte imprimée que dans le CD-Rom annexé), publiée par le ministère espagnol des Travaux publics. Ces routes sont signalées par un trait vert et des pictogrammes indiquant leur usage (cycliste, marcheur ou cavalier). Cette Carte officielle de Routes est accompagnée d’un Guide des espaces naturels, des parcours touristiques et des voies vertes qui délivre des renseignements de base sur les soixante tracés répertoriés. Chez nous, l’association Chemins du rail propose des balades de découverte des lignes de chemin de fer réaménagées (cfr Le Rail 4/02) ainsi qu’un voyage annuel. Elle édite également des guides, reprenant par région et par lignes ferroviaires, les itinéraires et leur accès par train. Quant à ceux du RAVeL, ils sont décrits dans des guides également (cfr Le Rail 10/02) ainsi que dans le cadre d’émissions radiophoniques.

Que l’on parte ou non en vacances n’a donc, en cette veille de grands départs, plus aucune importance puisqu’en cherchant un peu, bien échu qu’on ne trouve pas une voie verte propice aux balades, à proximité de chez soi ou un peu plus loin : en la combinant avec un trajet en train, les vacances sont à la portée de toutes les bourses et des plus vivifiantes ! Peut-être un jour, le succès de ces routes sera tel que l’on s’y bousculera

Association européenne des voies vertes (AEVV)

Rue Blondeau, 1 5000 Namur

Tél.: 081/22 42 56; télécopie : 081/22 90 02

Courriel : info@acvv-egwa.org

Chemins du rail Rue Blondeau, 1   5000 Namur

Courriel: cdrail@skynet.be

 

« Le rail »Mensuel des œuvres sociales de la SNCB juillet 2002