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Mise à jour : 03/07/2008 18:34:58

L’atelier de Salzinnes a cent ans

LE RAIL NAMUROIS

L’atelier de Salzinnes a cent ans

L'Atelier Central SNCB de Salzinnes fête ses cent ans. Il a tant marqué et marque encore tant la vie namuroise qu'il méritait un livre. C'est fait.

L'atelier central des Bas Prés, c'est, encore aujourd'hui, 870 emplois un des principaux employeurs de Namur. C'est aussi 21 hectares de voies, de bureaux, d'entrepôts et d'ateliers, au beau milieu de l'agglomération, dans un quartier qu'il a considérablement contribué à développer. C'est un chiffre d'affaires annuel de 53 millions d'€, avec toutes les répercussions directes et indirectes qu'on imagine sur la vie économique et sociale de la Ville.

Au printemps prochain, l'atelier central de Salzinnes aura 100 ans. On n'a pas de date plus précise : il n'y a pas eu d'inauguration officielle, et les archives sont muettes. Mais c'est bien entre janvier et avril 1904 que l'entreprise fut mise en route.

Le centenaire est donc proche, et pour le marquer, un membre du personnel de l'atelier, Bernard Anciaux, vient de rédiger et d'éditer un très beau livre historique. Qui intéressera bien sûr au premier chef les agents de l'Atelier, les anciens, mais aussi les Salzinnois et de façon plus générale tous les Namurois attachés au passé de leur ville et particulièrement son passé (et son présent) ferroviaire.

Jusqu'à 2202 emplois

Si un atelier a été construit à Namur, ce fut pour récupérer de la place à Bruxelles Quartier Léopold, où se trouvait dans les années 1870 un atelier de réparation des locomotives, mais que les chemins de fer voulaient déplacer.

Namur déposa dès 1879 sa candidature pour accueillir cet investissement porteur d'emplois, et proposa rapidement les terrains vagues des Bas Prés.

Projets sur plan et démarches politiques se succédèrent, mais il faudra un quart de siècle pour qu'ils se concrétisent.

En attendant, les abords allaient s'urbaniser rapidement et tout un quartier voyait le jour.

En 1903, le projet était bouclé et les travaux terminés, malgré les réticences des catholiques de voir arriver en leurs murs un millier d'ouvriers pour la plupart socialistes...

C'est l'époque de gloire de la vapeur. Mais les mutations technologiques se succèderont : arrivée du diesel, puis de l'électrique première et deuxième génération.

L'emploi va évoluer en dent de scie, oscillant toutefois toujours autour des mille agents. Deux périodes de pointe : la seconde guerre mondiale (2202 personnes embauchées) ; le début des années 1980 avec 1350 personnes.

Tout cela ne se passera pas sans heurts. Ni sans conflits sociaux (Namur est devenue coutumière des cortèges des « salopettes bleues »). Ni encore sans litiges avec les riverains, pour des questions de bruits, d'odeurs, de déchets. Ni enfin sans inquiétudes régulières dès que survient un plan de restructuration.

Sans cesse, les ouvriers en employés devront s'adapter aux nouvelles techniques. Pour aboutir aux technologies de pointe appliquées aujourd'hui et introduire aussi de nouvelles méthodes de gestion, de nouveaux concepts comme la question de l'environnement ou l'assurance qualité.

Tout cela, le livre de Bernard Anciaux le relate abondamment, avec un large souci de la précision et de l' illustration. En s'intéressant aussi aux activités socioculturelles (de la fanfare au judo en passant par les spectacles de théâtre) et syndicales.

« Au bout de ces cent ans, il y a une immense fierté et une reconnaissance pour ceux qui nous ont précédés et fait de notre outil ce qu'il est aujourd'hui », commentait le directeur de l'atelier central, Marc Bulteel, cette semaine lors de la sortie de presse du livre de Bernard Anciaux.

Jean-François PACCO

Et demain ?

Aujourd'hui, l'Atelier central de Salzinnes est responsable de l'ensemble des révisions (c'est-à-dire les grosses réparations) des locomotives du réseau SNCB. Ce qui en fait, après Malines (qui, lui, à la charge des automotrices) le second atelier ferroviaire du pays. Quelque 120 locos y entrent chaque année. Salzinnes produit aussi des pièces de rechange pour les petits ateliers et fabrique (il s'agit toutefois d'un volume de travail moins important) des simulateurs de conduite.

Outre la SNCB, dans le monde actuel de la libéralisation du rail, Salzinnes doit chercher d'autres clients, ce qui est déjà le cas, comme par exemple l'eurotunnel sous la Manche.

Et demain ? On sait que la direction générale de la SNCB veut réduire l'emploi. Pour le reste, rien n'est certain. En signant la préface du livre de Bernard Anciaux, l'administrateur-délégué Karel Vinck se veut quand même optimiste. « Longue vie à l'atelier central de Salzinnes et à ses cheminots », conclut-il.

 

Pratique

Le livre « Atelier central de Salzinnes, un parcours centenaire » (129 pages) est vendu, pour 18 €

dans les librairies

Vieux Quartier (rue de la Croix)

Papyrus (rue Bas de la Place)

Point Virgule (rue Lelièvre)

Confluent (rueTillueux à Jambes)

Lipajou, (place des Tilleuls Bouge)

Roels (place Ryckmans, à Salzinnes)

l'Office du tourisme de Namur.

Bernard Anciaux avait déjà rédigé en 1994 une histoire du théâtre de Namur. Le voici au terme d'un an et demi de recherches sur une des principales entreprises de la ville.

- par versement au compte

001 - 0436859 - 47 de Bernard Anciaux, à Vedrin.

' 081/ 21 49 61 È 0475/ 471 299

Début des années 60. La dernière locomotive à vapeur de type 18 sort des ateliers

Début des années 60. La dernière locomotive à vapeur de type 18 sort des ateliers

En 1881, un premier projet d’implantation des ateliers, dans un quartier de Salzinne qui n’est guère encore urbanisé. Le plan prévoyait (à gauche) un reccordement à la ligne charleroi via un coûteux pont oblique sur la Sambre.

En 1881, un premier projet d’implantation des ateliers, dans un quartier de Salzinne qui n’est guère encore urbanisé. Le plan prévoyait (à gauche) un reccordement à la ligne charleroi via un coûteux pont oblique sur la Sambre.

1944. Par crainte des bombardements, les Allemands transfèrent vers une ancienne bonneterie de Profondevllle une partie de la fabrication des pièces de rechange. Les ouvriers qui y sont déplacés doivent posséder un "auswels"

1944. Par crainte des bombardements, les Allemands transfèrent vers une ancienne bonneterie de Profondevllle une partie de la fabrication des pièces de rechange. Les ouvriers qui y sont déplacés doivent posséder un "auswels"

La fierté de l'Atelier central de Salzinnes : son pont roulant, le plus grand de la SNCB, le seul en Belgique à pouvoir soulever des charges de 110 tonnes.

La fierté de l'Atelier central de Salzinnes : son pont roulant, le plus grand de la SNCB, le seul en Belgique à pouvoir soulever des charges de 110 tonnes.

 

 

 

,QUAND LE RAIL NAMUROIS

PASSE DU XIXe AU XXIe  SIÈCLE

Depuis l’inauguration très réussie de la gare de Namur rénovée, le 19 septembre dernier, le voyageur qui vient y prendre le train a droit à un contraste saisissant. À l’extérieur, une jolie façade XIXe siècle en pierre de France, complètement restaurée avec le concours des réputés Compagnons Bâtisseurs français. A l’intérieur, un décor «high tech» futuriste digne du XXIe siècle conduit notre voyageur par escalier fixe, escalator ou ascenseur panoramique sur la dalle surplombant désormais les quais. Structures métalliques apparentes, grandes baies vitrées et puits de lumière forment désormais le décor d’une salle des pas perdus nouveau style avec guichets conçus pour personnes en fauteuil roulant, «travel center» toilettes, espace bagages et consigne, locaux de service, commerces variés... et signalétique électronique dernier cri. Au sol, un revêtement gris clair souligne les dalles en relief au dessin codé permettant aux aveugles de se déplacer en toute sécurité. Bref, un petit bijou d’architecture mariant l’ancien et le nouveau.

Ce concept novateur appliqué à la capitale de la Wallonie mérite bien une mise en perspective historique, afin de retracer l’évolution d’un des premiers noeuds ferroviaires de Belgique, des débuts du chemin de fer à cette année 2002.

NAMUR ET LE CHEMIN DE FER DU XIX E SIÈCLE :

ÉTAT, NORD BELGE

ET GRANDE COMPAGNIE DU LUXEMBOURG

De la première gare de Namur, il n’existe sans doute aucune représentation.

Érigée en 1843, huit ans à peine après l’inauguration de la première ligne de chemin de fer de Belgique, elle desservait modestement la ligne Namur - Charleroi - Manage, que l’État belge venait de mettre en service par la vallée de la Sambre. À peine tolérée par les militaires, située au pied des fortifications de l’époque, c’était une construction en bois inspirée des pavillons d’octroi, facilement destructible en cas de conflit armé pour ne pas gêner le tir des artilleurs... Elle ne desservait que quatre voies principales et trois accessoires... Bien vite cependant, d’autres lignes firent de Namur un noeud ferroviaire. Ainsi en fut-il de Namur–Liège, construite avec des capitaux anglais par la « Compagnie de chemin de fer de Namur à Liège », et dont l’ouverture nécessita le remplacement du chalet en bois par une construction en dur : c’était sans doute un de ces bâtiments sans style ou fioriture, typique des premières constructions ferroviaires de l’époque, orientées résolument vers le « fonctionnel ».

Le Nord-Belge apparut alors. Filiale de la puissante compagnie du Nord Français, financée par la célèbre famille Rotschild, cette compagnie, baptisée le 19 mai 1854, développa une stratégie d’implantation en Belgique, au départ du nord de la France, afin de se ménager des parts de marché dans le transport des grosses marchandises des bassins houillers et sidérurgiques du Borinage, de la région de Charleroi et du bassin de Liège, mais aussi de la Ruhr et de l’Allemagne. Ainsi, après avoir pris à bail la Compagnie de Charleroi en 1854, le Chemin de fer de Mons à Haumont (Feignies) et son raccordement vers Maubeuge, le Chemin de fer de Saint-Ghislain, il s’empara de l’importante section Namur – Flémalle - Liège, via Tilleur et Seraing, pris à bail également, pour nonante ans le 1er janvier 1855. Ainsi, le Nord-Belge s’installa à Namur, où il disposa rapidement d’une remise à locomotives propre et d’installations diverses pour son personnel, puisqu’il gérait désormais, avec l’aide du Nord-Français, l’axe Paris - Liège, sur lequel il organisa des trains directs dès 1855. Un seul hiatus subsistait en fait sur cette ligne, la section Namur - Charleroi dont l’État Belge, propriétaire, ne voulut jamais se défaire, pour des raisons de sauvegarde de souveraineté : dame... la Belgique était un État tout neuf, placé en tampon entre l’Allemagne et la France, et qui se devait de veiller jalousement à sa neutralité et à sa souveraineté. Pour contourner la section restée propriété de l’État, le Nord-Belge construisit, dans la vallée de la Meuse, une ligne de Namur à Dinant et Givet, afin de disposer d’un itinéraire dont il serait propriétaire pour gérer les courants de trafic entre la sidérurgie liégeoise et l’est de la France : transport de coke dans le sens mines liégeoises sidérurgie lorraine, transport de minerai de fer des mines du bassin de Briey vers les forges liégeoises. La ligne Dinant - Givet fut ouverte au trafic de bout en bout en 1863. Namur prenait ainsi de plus en plus d’importance comme carrefour ferroviaire tant en trafic voyageurs que marchandises : l’artère Bruxelles - Namur - Luxembourg venait d’être ouverte entre 1854 et 1859. On profita alors de la décision de Léopold Ier d’autoriser le démantèlement des fortifications de Mons, Charleroi et Namur pour démolir les remparts à Namur, créer de grands boulevards... et un nouveau bâtiment de gare, flanqué d’une place digne de ce nom. Les premiers architectes venaient par ailleurs d’être embauchés aux chemins de fer de l’État belge. Ils eurent pour consigne d’abandonner le style fonctionnel, sévère et dépouillé primitif et de créer des bâtiments avenants. Il fallait en outre doter les chefs-lieux de province de bâtiments de gare à la hauteur de leur mission, au sein d’un État encore très centralisé, où les institutions provinciales, directement héritées du modèle napoléonien des départements français, avaient pour fonction première de surveiller les édiles locaux et leurs initiatives.... Ainsi, outre Charleroi-Sud, trois chefs lieux de province wallons, Mons, Namur et Liège-Guillemins furent dotés d’un bâtiment de gare ornemental de style renaissance française, très prisé à l’époque pour la construction de bâtiments publics.

Le bâtiment de Namur, aujourd’hui restauré, est l’oeuvre de l’architecte Lambeaux. Sa façade néo-classique tournée vers la ville est animée par un refend et arbore les blasons des neuf provinces de l’époque. C’est en fait une combinaison d’ailes et de pavillons en pierre autour d’un corps de bâtiment central à trois ouvertures de huit mètres de haut avec attique couronné d’un fronton percé d’une horloge. Deux ailes symétriques complètent l’ensemble, des volumes présentant l’aspect de combinaisons à deux niveaux alors que l’espace n’en a en fait qu’un seul. Vu le trafic enregistré à Namur, les quais furent couverts de trois verrières, une pour les voies 1 à 5 en face du bâtiment de gare, une deuxième pour les voies 8 à 10 de gare latérale côté Dinant, et une troisième pour les voies en cul-de-sac 11 à 13 de la direction de Charleroi. Bien vite, les voies 8 à 11 devinrent le fief du Nord-Belge, qui y réceptionnait et expédiait ses trains pour Liège ou Dinant - Givet. Namur était en effet une gare commune, dirigée par la Compagnie des chemins de fer belges de l’État - qui fournissait le chef de gare - mais utilisée en commun avec les deux compagnies privées qui la desservaient aussi. Si la Grande Compagnie du Luxembourg, exploitante de la ligne Bruxelles - Namur - Arlon fut rachetée par l’État dès 1875, le Nord-Belge, lui, continua ses activités indépendantes en gare de Namur jusqu’en 1940 : à cet effet, il disposait d’une remise à locomotives et d’autres installations de service distinctes sur un site déjà étriqué, mais desservi depuis 1891 par pas moins de six cabines de type Saxby.

Cette cohabitation n’alla pas sans créer des problèmes : il y avait les règlements ferroviaires différents, du plus pittoresque l’usage de donner le départ au sifflet à roulette à l’État Belge ou à la trompette au Nord-Belge au plus sérieux, comme l’ordre de classement d’un train avec fourgon en tête au Nord-Belge, en queue à l’État, en passant par la concurrence. Ainsi État Belge et Nord-Belge organisèrent-ils, dès 1873, des trains de pèlerinage concurrents, pour mener les fidèles à Lourdes : l’État par Charleroi, le Nord- Belge par Givet... Il y avait aussi le fait que cheminots-fonctionnaires de l’État et agents privés du Nord-Belge n’avaient pas les mêmes traditions et la même manière de concevoir le service au public. Quant aux salaires... à travail égal, le Nord-Belge était plus généreux envers ses employés que l’État...

NAMUR AU XXE SIÈCLE : UNE ADAPTATION PROGRESSIVE AU TRAFIC

Tout au long du XXe siècle, Namur bénéficia d’aménagements dictés par un trafic de plus en plus soutenu. Dès 1909, la gare fut dotée des deux souterrains pour voyageurs actuels, qui permettaient enfin de desservir les quais en toute sécurité : des aménagements qui furent accueillis avec un réel soulagement par le personnel chargé de la sécurité de la gare. Des cabines électriques remplacèrent par ailleurs les anciennes Saxby sur un noeud ferroviaire de plus en plus fréquenté. Cinq ans plus tard, c’était la Première Guerre mondiale : la gare en sortit aussi meurtrie que la ville. Ainsi, fallut-il remplacer quelque 17 000 vitres des verrières effondrées à la suite des bombes lancées par les aviateurs anglais.

En 1928, un travail de remise en valeur du bâtiment fut entrepris, autant pour les façades extérieures, nettoyées et repeintes, qu’à l’intérieur où bureaux et parquets furent rénovés. Au-dessus du fronton, trônait désormais un complexe mais disgracieux portique soutenant tous les fils téléphoniques reliant Namur aux autres gares de la région... Le plan des voies fut conservé, même si les voies 6 et 7, jusque là réservées aux marchandises, furent dotées d’un quai pour augmenter la capacité d’accueil de la gare pour les trains de voyageurs.

Pour l’information, on faisait avec les moyens du bord : il n’y avait ni haut parleurs ni système automatique d’annonce des trains. C’était le temps des garde-salle, qui mettaient à jour les trois « buffets à tiroirs », tableaux récapitulatifs des trains attendus, situés dans la salle des pas perdus et les salles d’attente respectivement de 1re, 2e et 3e classe. Il y avait aussi les « plaqueurs », chargés de disposer sur chaque quai l’indication de la destination du train attendu, sa nature et l’heure, au moyen des célèbres plaques amovibles à fond bleu, aujourd’hui détrônées par les écrans de télévision et autres appareils électroniques... Et quand il y avait un changement inopiné de voie, le sous-chef à quai ne pouvait compter que sur la vigueur de sa voix, relayée par les chefs-gardes des trains, habitués à crier à longueur de journée le nom des gares d’arrêt de leur train.... Namur fut aussi dotée d’un quai de transbordement couvert à trois voies, pour l’acheminement rapide des messageries. Tous les trains de prestige s’arrêtaient à Namur, au croisement des axes Ostende - Bâle et Paris - Cologne. L’arrêt était mis à profit pour abreuver les locomotives... et pour permettre aux voyageurs intéressés de se rendre à la voiture-restaurant du train, à une époque où toutes les voitures n’étaient pas encore équipées de soufflets d’intercirculation... Les trains Ostende - Bâle étaient systématiquement tractés par les célèbres locomotives à vapeur type 10, notamment un célèbre « Pullman » baptisé « Edelweiss », en correspondance avec les « malles » en provenance de Douvres. De son côté, le Nord-Belge avait progressivement créé avec sa maison mère française des trains de luxe à grand parcours des « rapides » selon la nomenclature de cette société qui reliaient Paris et l’Europe centrale et orientale. Parmi ceux-ci, il y eut le célèbre Nord-Express, créé le 9 mai 1896 entre Paris et Saint-Petersbourg, dont l’itinéraire et le terminus évoluèrent au gré des avatars de l’histoire : il ne disparut qu’avec l’apparition des TGV sur la relation Paris - dorsale wallonne - Liège. Il y eut aussi un certain « 185 », Paris - Cologne, qui comportait une voiture directe Paris ... Spa, décrochée à Verviers pour être ensuite acheminée à destination. Il y eut enfin le « Valeureux Liégeois », un train temporaire créé pour l’exposition internationale de Liège, du 15 mai au 4 octobre 1930, et qui parvenait à couvrir, à la vapeur, le trajet de 367 km entre Paris- Nord et Liège-Guillemins en... 4 heures. Il eut tellement de succès qu’il fut maintenu après l’exposition et prolongé... à Berlin, jusqu’à ce qu’un certain Adolf Hitler plonge la société allemande dans les cauchemars. En tête du train et sur la totalité du parcours, une machine à vapeur « Nord », toujours rutilante, et qui « tournait comme une horloge »... D’autres circulations attiraient aussi la curiosité. Il y avait le fameux train-économat que les dirigeants du Nord-Belge, avec un sens social mâtiné de paternalisme, faisaient circuler tous les quinze jours entre Liège-Longdoz, Namur et Givet : à bord des deux voitures et du fourgon qui le composaient, un véritable bric à brac où les cheminots de la compagnie privée et leur famille pouvaient acheter à prix très étudié denrées alimentaires et autres vêtements.

Pour le trafic des marchandises, il y avait aussi des circulations pittoresques.

Les anciens colombophiles se souviendront des trains de pigeons expédiant les volatiles sur la ligne de Paris et même au-delà... en vue de leur participation à des concours internationaux. Accompagnés de convoyeurs, et guettés par leurs propriétaires grâce à l’INR, ces trains étaient « à marche recommandée »... Fin juin et début août, foire namuroise oblige, il y avait aussi les trains de cirque : vingt à cinquante wagons à décharger ou recharger, avec non seulement les métiers des forains, mais aussi les agrès du cirque et leur ménagerie...

Et entre-temps, il y avait les trains de minerais : six rames à charge en provenance de Dinant vers le bassin sidérurgique liégeois, et trois rames doubles à vide dans l’autre sens.

LA PÉRIODE CONTEMPORAINE :

RÉNOVATION «HIGH TECH»

Après les malheurs et destructions de la Seconde Guerre mondiale, la gare de Namur, désormais unifiée par la reprise du Nord-Belge par la SNCB, subit trois cures de modernisation.

La première fut l’électrification de tout le noeud ferroviaire namurois, une fois la ligne vers Ramillies abandonnée. Les caténaires 3 kV arrivèrent à Namur avec l’électrification de la ligne Bruxelles - Namur - Luxembourg, mise en service le 30 septembre 1956. Namur - Charleroi suivit un an plus tard. Pour l’électrification de Namur - Liège, il fallut attendre 1970, vu l’ampleur des travaux à y réaliser. La liaison Paris - Cologne fut alors entièrement électrifiée, et Namur vit passer les locomotives polytension série 40 100 de la SNCF, épaulées par les 15 et 18 de la SNCB, en tête de tout le trafic international. Ce fut aussi le temps des Trans-Europ- Express, assurés d’abord par autorails diesel, puis par les célèbres automotrices quadritension suisses, enfin par des rames tractées aujourd’hui détrônées par le réseau TGV Thalys. L’électrification de Namur - Dinant, quant à elle, ne fut réalisée qu’en 1990.

La deuxième vague de modernisation toucha les installations voyageurs du bâtiment de gare lui-même, qui furent rafraîchies dans le style « Expo 58 » entre 1969 et 1977.

La troisième vague, elle, fut déclenchée par trois facteurs : la désignation de Namur comme capitale de la Wallonie en 1986, le réinvestissement gouvernemental dans le rail grâce au plan « Star 21 » et la décision d’aménager un axe ferroviaire lourd pour le fret entre Anvers, l’est de la France, la Suisse et l’Italie qui passerait précisément par les installations de Namur.

La SNCB décida alors de repenser complètement le noeud ferroviaire, en séparant le trafic des marchandises du trafic des voyageurs, et en veillant à éviter tout cisaillement entre le trafic voyageurs de la dorsale wallonne et celui de l’axe Bruxelles - Luxembourg. La SNCB décida aussi de valoriser l’espace occupé en ville par le noeud ferroviaire : l’idée germa alors de construire une dalle au-dessus des voies à quai, sur un modèle déjà éprouvé à Malmö, Stockholm, Göteborg, Utrecht ou Madrid. La ville de Namur saisit par ailleurs cette opportunité de rénovation urbaine pour désenclaver le quartier de Bomel, tandis que le Ministère wallon de l’Équipement et des Transports allait faire bâtir le long des voies, de l’autre côté de la gare, un complexe de bâtiments en escalier conçu comme une véritable artère de communication.

Commencés en 1993, ces travaux furent menés à la condition expresse de maintenir tout le trafic voyageurs et fret pendant toute la durée du chantier. C’est ce tout nouveau complexe qui a été inauguré le 19 septembre dernier. Les clients de la SNCB, à leur arrivée dans le bâtiment de gare restauré, trouvent une galerie commerciale avant de monter au premier étage de la dalle, d’une superficie de 11 000 m2, où sont situés tous les services nécessaires à leur voyage. Escalators et ascenseurs panoramiques avec commande vocale les conduisent sur les quais des onze voies voyageurs les voies 1 et 2 seront ultérieurement isolées par un caisson phonique et réservées au passage des trains de marchandises de l’axe Anvers - Athus-Meuse. Une communication avec les installations du MET est par ailleurs prévue.

Et le second étage de la dalle ? D’emblée, la SNCB avait prévu de le céder au secteur privé. Après bien des palabres, on vient d’apprendre que la ville de Namur a délivré le permis d’urbanisme pour la construction d’un complexe cinématographique. Ainsi, dans quelques années, le voyageur en mal de correspondance aura même le loisir d’aller voir son film préféré... Mais le remodelage du noeud de Namur n’est pas encore terminé. Il reste notamment le renouvellement de la passerelle d’Herbatte et le pont-tube prévu à la sortie est de la gare, pour permettre aux trains de la direction de Liège de passer sous les voies de la ligne du Luxembourg. Plus globalement, le réaménagement de la configuration des voies, des aiguillages et des croisements permettra le passage des trains de voyageurs à une vitesse de 60 ou 80 km/h en avant-garde au lieu des 40 km/h actuels sur itinéraires préférentiels, afin de gagner quelque trois minutes de temps de parcours. Il y a aussi la concentration progressive des installations de signalisation dans une seule cabine nodale de type PLP. Bref, à l’horizon 2006, la rénovation fondamentale du site devrait être terminée.

A ce moment, la capitale de la Wallonie sera dotée d’installations ferroviaires dignes du rôle qu’elle doit jouer en ce début de XXIe siècle...

En termes de passagers, Namur est la sixième gare du pays et la première gare de Wallonie, devant Liège- Guillemins et Ottignies.

Nombre moyen de voyageurs par jour ouvrable : 18 553;

Nombre moyen de voyageurs le samedi : 6 412;

Nombre moyen de voyageurs le dimanche : 5 900;

Nombre de trains de voyageurs par jour ouvrable : 400;

Nombre de trains de marchandises par jour ouvrable : 250.

 

Auteur : Roland Marganne

« Le rail »Mensuel des œuvres sociales de la SNCB novembre 2002

 

quelques chiffres (année

2000)